Comme moi, vous avez peut-être souri en voyant depuis quelques jours les nombreux articles sur la semaine de travail de 4 jours!
"La semaine de travail de quatre jours, une idée qui fait du chemin" -TVA nouvelle
"5 raisons de croire que la semaine de 4 jours, c’est l’avenir" -Jobillico
"Semaine de 4 jours : et si c’était vous?" -Radio-Canada.ca
Bon… Pour ceux qui me porteraient des intentions.. Qui pourraient croire que je suis de la vieille école ou même que je suis un « workaholic », détrompez-vous (du moins en partie…)! Dans les faits, ce sujet m’a fait réfléchir sur la relation que j’entretiens avec le travail. Une relation possiblement similaire à celle des producteurs agricoles…
Chaque année, l’équipe du CECPA réalise des études dans lesquelles nous demandons à des producteurs d’estimer le temps qu’ils consacrent annuellement à leur entreprise. Un exercice pas si facile pour des personnes qui travaillent souvent sans compter réellement leurs heures. L’exercice en vaut toutefois la peine!
Il permet en effet de porter un œil critique sur l’un des principaux intrants de notre entreprise. Bien évidemment, pour faire cet exercice, il faut laisser de côté notre chapeau d’entrepreneur pour celui de gestionnaire. L’objectif est d’observer l’évolution du temps travaillé dans l’année, d’identifier quels groupes d’activités sont les plus énergivores et… de se donner une note.
Je vous invite ainsi à faire l’exercice. Vous trouverez des comparables disponibles dans plusieurs études que nous produisons.
En agriculture, particulièrement, le temps des exploitants et de la famille de ceux-ci est souvent un grand oublié. On a seulement à regarder certaines analyses économiques où seuls les fameux retraits des propriétaires sont considérés. Je ne dis pas que c’est incorrect comme approche économique, puisque cela permet tout de même une analyse des liquidités de l’entreprise. Je dis simplement qu’en regardant seulement les documents financiers, nous n’avons pas une photo complète pour bien analyser la performance d’une entreprise.
D’un point de vue plus macroéconomique, l’absence de valeur pour une portion du travail peut également rendre difficiles les comparaisons de la rentabilité des maillons d’une filière. Au-delà de celui de la production, le temps a souvent un coût bien tangible affectant directement les marges.
En terminant, je tiens à souligner qu’il faudrait trouver le moyen de mieux doser notre relation amour-haine avec le temps de travail. Dans les faits, lorsqu’on aime la profession que l’on a choisie, qu’on a du plaisir à y travailler et que nous avons la fibre d’entrepreneur, il est possiblement sain de ne pas compter ses heures. La vision de l’évolution de notre entreprise doit demeurer le carburant qui nous motive et qui oriente le temps que nous y consacrons. C’est ça qui nous allume et qui fait bruler cette flamme en nous.
De l’autre côté, il serait sain, à l’occasion, de prendre un pas de recul sur le temps que nous consacrons au travail. À la lecture des articles de la Terre de Chez Nous des dernières semaines, je constate comment cette passion de l’agriculture peut être à la fois source de très grandes réalisations et de très grandes préoccupations pour des personnes qui s’y consacrent souvent corps et âme. À cet effet, je tiens à souligner le travail effectué par les travailleuses et travailleurs de rang dans les dernières années. Chapeau!
Je vous invite maintenant à porter un regard critique sur votre temps de travail… Réussir à réduire à "5" le nombre de jours travaillés par semaine serait déjà, pour plusieurs agriculteurs, un objectif plus réaliste à se donner pour la prochaine année. Non?
Bonne réflexion!
Francis Goulet, Directeur Général